COMBIEN DE PRÉCAIRES VONT ÊTRE PRIVÉS D’INDEMNISATION?
Le document de travail de l’UNEDIC à télécharger, cet article le résume :
Premières conséquences suite annonce réforme de l’UNEDIC
Combien de chômeurs vont perdre avec la réforme de l’assurance-chômage ? Dans un tir de barrage contre Muriel Pénicaud, mardi à l’Assemblée nationale , trois figures de l’opposition y sont allées de leurs estimations : 300.000 selon le communiste Pierre Dharréville, le double selon l’insoumis Adrien Quatennens, et même 100 % a dénoncé le socialiste Boris Vallaud. A cela, la ministre du Travail a opposé que la réforme ne sortirait personne du chômage mais, qu’au contraire, elle les aiderait à en sortir.
A cette question, objectivement compliquée car elle suppose d’anticiper les changements de comportements de chômeurs induits par les nouvelles règles d’indemnisation, l’Unédic esquisse une réponse. Une réponse partielle car elle concerne seulement les nouvelles règles donnant accès à ou prolongeant l’indemnisation. Verdict : « De l’ordre de 500.000 personnes seraient […] impactées par une ouverture de droit retardée ou annulée », peut-on lire dans un document confidentiel auquel « Les Echos » ont eu en partie accès.
Un demi-million
Ces nouvelles règles prévoient qu’à compter d’avril 2020, il faudra avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers pour ouvrir des droits, et non plus 4 sur 28. Une fois les droits ouverts, il faudra avoir travaillé 6 mois et non plus 1 pour les recharger (prolonger) d’autant, dans le cadre de ce que l’on appelle le cumul emploi-chômage. Le document en question dénombre 300.000 ouvertures de droits entre 4 et 6 mois en 2018, et 250.000 rechargements pour une durée de 1 à 6 mois. D’où l’estimation d’un demi-million de personnes potentiellement affectées par le relèvement des seuils, une même personne pouvant ouvrir puis recharger dans la même année.
Contactée, l’Unédic, qui est géré par les partenaires sociaux, rappelle qu’en 2018 il y a eu 1,72 million d’ouvertures de droits et 670.000 rechargements. Soit près de 2,4 millions d’actes de ce type au total. Une simple division amène donc à conclure que les nouvelles règles en question pénaliseraient un chômeur indemnisé sur cinq.
Maximum théorique
Cette estimation n’est pas incompatible a priori avec celle que l’entourage de Muriel Pénicaud avait indiqué en présentant la réforme : entre 600.000 et 700.000 personnes seraient potentiellement impactées par la réforme, tous changements compris (outre la règle des droits, la nouvelle formule de calcul du salaire de référence, le bonus-malus, la dégressivité, accompagnement renforcé par Pôle emploi…). En soulignant bien qu’il s’agit là d’un maximum théorique.
En clair, ce maximum serait atteint en appliquant les nouvelles règles aux futurs chômeurs en supposant qu’ils auraient le même comportement que ceux à qui ont été appliquées les règles actuelles. Dans le cas du relèvement du seuil d’éligibilité à une allocation chômage par exemple, une personne qui ne pourra pas travailler au moins six mois sera effectivement écartée. A l’inverse, une autre qui pourra rajouter deux mois de plus que les quatre minimum actuels sera indemnisée.
Une chose est acquise en revanche : les deux règles pointées par le document Unédic sont celles dont le changement doit rapporter le plus aux finances de l’Unédic : 2,8 des 3,75 milliards d’économies attendues d’ici à 2021 .
Les syndicats en colère
Après ces annonces, les syndicats ont dénoncé des baisses de droit massives pour les demandeurs d’emploi. « Plus d’un million de personnes touchées », a expliqué Laurent Berger à la CFDT. De son côté, la CGT évoquait « des centaines de milliers de travailleurs précaires ciblés par le gouvernement ». L’entourage de Muriel Pénicaud au moment de la présentation de la réforme évoquait entre 600 000 et 700 000 personnes touchées, tous changements compris.
Or, un récent document de travail de l’Unedic, que RTL s’est procuré, évoque des chiffrages bien plus élevés de demandeurs d’emploi impactés. Trois conséquences sont détaillées : « Moins de demandeurs d’emploi ouvriront un droit », « pour certains allocataires, la durée du droit sera plus courte » et « l’allocation journalière sera plus faible pour les personnes ayant travaillé de manière discontinue ».
Dans le détail, tous les demandeurs d’emploi qui ont travaillé moins de 6 mois au cours des 24 derniers mois et tous ceux qui ont recommencé à avoir des petits contrats sans pour autant accumuler 6 mois de travail seraient touchés, soit déjà 500.000 personnes. Le document de l’Unedic explique que « de l’ordre de 500.000 personnes chaque année seraient donc impactées par une ouverture de droit retardée ou annulée ». Et il ne s’agit là que d’une partie des effets de la future réforme.
La deuxième conséquence, soit une durée de droit plus courte pour certains allocataires, concernerait-elle, un peu moins de 250.000 allocataires.
Enfin, le troisième effet, celui qui devrait concerner le plus de monde, est l’effet d’une baisse du montant de l’allocation journalière. Le document de l’Unedic précise qu’il est « délicat à ce stade d’estimer la population concernée » mais qu’une première approximation permet quand même de dire qu’environ « la moitié des entrants, soit 1,2 million de personnes, seraient affectés à des niveaux variables, par cette prise en compte des périodes sans travail ».
L’Unedic précise qu’il est impossible d’additionner le nombre de personnes concernées par les trois effets car certains seront touchés à la fois par une durée de droits plus courte par exemple, et une baisse du montant d’allocations.